Un matin gris sur la place Vendôme. Derrière une vitrine trop propre, trois flacons s’alignent comme des soldats d’un régiment très bien élevé. À l’intérieur, la collection Journey To China. L’ambiance est solennelle. La vendeuse pose ses mains gantées sur le comptoir — un geste de ballet contemporain — et murmure en souriant : « Trois créations inédites. Inspirées par la Chine. Attention, chef-d’œuvre à déguster. »
L’œil plonge dans les couleurs laquées. Bleu cyan vif qui défie le ciel de Paris, vert menthe pastel pour qui rêve de fraîcheur, blanc lacté nimbé de mystère. Sur chaque bouteille, un capot vibrant, parfois orange effronté, parfois rose pâle ou prune profonde. Bref, chaque flacon son humeur, mais toujours ce goût du détail maîtrisé, presque obsessionnel.
Quand la tradition chinoise se mêle au chic parisien
La scène pourrait rappeler une séance de dégustation très privée dans un palais de jade. En fait, c’est plutôt un face-à-face entre héritage et rêve, où l’Asie millénaire vient inspirer la précision française. Les trois nouvelles fragrances racontent chacune leur odyssée, mi-conte, mi-carnet de voyage.
Si la marque aime raconter des histoires, ici, elle ne lésine pas sur le décor. Chaque parfum déroule sa partition olfactive comme on feuillette un album grand format de calligraphies et de paysages chinois imaginaires. On hume, on écoute, parfois on s’interroge : mythe ou réalité ? Peu importe, seuls les souvenirs persistent.
Moon Tale : poésie florale sous la lune
Une nuée bleue électrique annonce tout de suite la couleur. Moon Tale intrigue avec ce contraste : peony délicate et magnolia tannique s’enlacent, bientôt rejointes par un jasmin sambac dont le nom évoque déjà le cinéma hongkongais des années 60.
Le géranium s’invite, piquant comme une remarque inattendue autour d’une table familiale. Framboise, en note finale, apporte cette férocité sucrée, digne d’un dessert-lune servi à minuit. La bouteille, bold attitude, ose marier le bleu et l’orange, histoire de réveiller même les plus endormis.
Rain Tea : verdure aromatique après la pluie
Un souffle frais, celui qu’on imagine sur une terrasse perdue dans les montagnes du Yunnan, alors que la brume baisse pavillon. Rain Tea déroule son jeu tout en nuances. Citronnelle bondissante qui claque dès le départ ; odeur de thé vert humide, élégante et réconfortante. Magnolia, encore lui, ici assagi, joue les médiateurs.
En arrière-plan, la rose apaise, limite méditative. Parfois, on croirait sentir l’infusion tiède d’un salon silencieux. Flacon laqué de vert tendre, bouchon saumon, la présentation frôle la zenitude. Et soudain, on a envie d’essayer le kintsugi olfactif sur soi.
Ink Mark : fragments d’encens et mémoire tatouée
Blanc laiteux impeccable. Capuchon prune en mode « mystérieuse inconnue dans un roman de gare ». Ink Mark mise sur la puissance tranquille : encens lancinant, rose sans innocence, ambre profond et bois de santal pour l’ancrage.
Ce parfum, signé pour ceux qui aiment laisser une trace, évoque volontiers la soif de modernité et de secret. L’accord, aussi tendu qu’un trait de plume sur du papier de riz, oscille entre chaleur enveloppante et froideur sophistiquée. Un peu comme ces films où il ne se passe rien, mais où tout s’écrit entre les lignes.
Entre scénographie visuelle et narration olfactive
Pas question de proposer un bouquet ordinaire. Ici, le show commence avant même la première pulvérisation. La maison s’inspire librement de l’artisanat asiatique : les teintes résolument pop de chaque laque, les capuchons hautement instagrammables… Rien n’est laissé au hasard.
Dans la boutique, la scénographie rappelle les vitrines de musées ultramodernes. La lumière accroche les courbes, caresse les vernis, sculpte l’aura de chaque référence. Plus qu’un parfum, ce sont des petits monuments portatifs, prêts à coloniser vos étagères de salle de bain.
- Moon Tale, idéal pour les adeptes de bouquets opulents et de nuits blanches.
- Rain Tea, promesse d’air pur garanti même par temps de métro bondé.
- Ink Mark, signature discrète pour ceux qui connaissent l’art d’être remarqué sans bruit.
Pourquoi associer modernité occidentale et symbolique orientale ?
On goûte la tentation de fusion, ce mélange osé : savoir-faire parisien, ingrédients choisis façon cueillette de l’aube, palette visuelle inspirée du folklore et du futurisme. Un dialogue permanent entre deux mondes censés s’ignorer, mais qui finissent toujours ensemble autour d’une table basse.
Parmi toutes les maisons qui aiment explorer la planète, rares sont celles qui dessinent ainsi une carte sensorielle précise. Car il s’agit moins de reproduire l’exacte senteur d’un thé ou la vraie douceur d’une pivoine, que de créer un pont invisible, via quelques gouttes bien placées. Faire voyager sans partir. Technique ancienne, désir moderne.
Nom du parfum | Principales notes | Code couleur du flacon |
---|---|---|
Moon Tale | Pivoine, magnolia, jasmin sambac, géranium, framboise | Bleu cyan avec bouchon orange |
Rain Tea | Citronnelle, thé, magnolia, rose | Vert menthe pastel avec bouchon saumon |
Ink Mark | Encens, rose, ambre, bois de santal | Blanc lait avec capuchon prune |
Les nouveautés qui feront (enfin) aimer les collections éphémères ?
Les initiés froncent parfois le nez devant les éditions limitées. Trop tendance, trop vite oubliées. Ici, piège évité : derrière chaque nom, un scénario pensé comme un film d’auteur. Les flacons veulent durer, quitte à devenir pièces de collection ou objets totems d’un moment précis.
Prix coquet, ambitions élevées. Mais le jeu en vaut la chandelle, dit-on. Surtout lorsqu’un parfum réussit à transformer la routine quotidienne en road-movie de poche. Reste à choisir son embarquement : la lune, la pluie, ou l’encre indélébile. Paris-Pékin aller simple, possible en toque de vaporisateur.
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